Arthur Rimbaud
Larme
Loin des oiseaux des troupeaux des villageoises
Je buvais accroupi dans quelque bruyère
Entourée de tendres bois de noisetiers
Par un brouillard d'après-midi tiède et vert

Que pouvais-je boire dans cette jeune Oise
Ormeaux sans voix gazons sans fleurs ciel couvert
Que tirais-je à la gourde de colocase
Quelque liqueur d'or fade et qui fait suer

Tel j'eusse été mauvaise enseigne d'auberge
Puis l'orage changea le ciel jusqu'au soir
Ce furent des pays noirs des lacs des perches
Des colonnades sous la nuit bleue des gares

L'eau des bois se perdait sur des sables vierges
Le vent du ciel jetait des glaçons aux mares
Or tel qu'un pêcheur d'or ou de coquillages
Dire que je n'ai pas eu souci de boire