Gaël Faye
Des graines
Les âmes s'assoupissent sous la chaleur intense
Et les palmiers s’en balancent, des rigoles d'immondices
Notre pays embourbé où le peuple est un gueux
Et le ciel est suspect d'être si beau et si bleu
Chaque jour est une peine, veine sous l’astre brillant
On muselle les rêveries depuis bien longtemps
Le futur paraît vain, le tyran si puissant
Mais [...] d'où proviennent ces chants, ces voix que l'on entend ?

Et sous ce grand soleil, dictateur comme un père
La bouche pâteuse de rêve un jour se désaltère
Humidifie ces lèvres, libère ce qu'elles retient
Les formules qu'elles célèbrent et le pays qui vient
Renverse la dictature, piétine ses statues
On repeindra les murs m'a dit l'homme de la rue
Dépoter le despote, planter des fleurs nouvelles
Additionner nos cœur, en faire des archipels

Le soleil au zénith, la rue nous invite
Nous abrite un jour, on se lève pour être libre
On débat on s'agite, au départ on évite
La violence qu’ils impliquent, qu’ils renvoient, qu'ils appliquent
On répond par des rimes, on s’invente des rites
On déconstruit leurs mythes, on refuse la fuite
Ils nous traquent aux satellites, nous envoie l'armée, les flics
L'humeur est sismique donc un jour on réplique
C'est le fracas dans la ville, la bravoure du civil
Et la force vient de loin, de l’amour de la vie
On affronte le destin chauffé à blanc sont les poings
Et l'on frappe, on risposte le regard vers demain
Et l'espoir qui nous porte nous aide à tenir
On écrit aujourd'hui les poèmes à venir
Bien qu'on tombe constamment sous le feu de leur haine
S'ils nous enterrent ils perdront car nous sommes des graines