Renan Luce
Nantes
C'est d'abord sa frimousse
Avant de voir son pouce
Qui m'a fait ralentir
Sa voix à la portière
À ce ton de prière
De celles qui savent mentir

«Ni perdue, ni mendiante
J'suis étudiante
Dans ta caisse, bringuebalante
Ta route, est-ce Nantes ?»

Bien sûr, c'était pas mon chemin
Mais j'ai senti mes mains
Vissées sur le volant
J'ai jamais été audacieux
Mais j'ai senti mes yeux
Glisser sur ses collants

On a quitté Paris
Et la ville canari
On l'atteindra demain
T'as passé les six heures
Dans le rétroviseur
À torturer tes mains

Court-vêtue, impatiente
Qui es-tu, diantre ?
Qu'as-tu vu qui te hante
Pour que tu mentes ?

Bien sûr, c'était pas mon problème
Mais quand j'ai vu l'emblème
D'une station Texaco
J'ai jamais été audacieux
Mais sur l'parking silencieux
J'ai garé mon tacot

Une station essence
Trois minutes d'absence
Il m'en fallait bien moins
Pour ouvrir son sac
Y trouver dix plaques
Et une arme de poing

Dangereuse, envoûtante
Religieuse mante
J'la revois, chancelante
Quand je la plante

Bien sûr, parfois je m'en souviens
C'est alors que revient
La question lancinante
Si j'avais été audacieux
Qu'aurais-je vu sous les cieux
Qui s'étalaient sur Nantes ?