La Rumeur
Écoute le sang parler
[Refrain]
Écoute le sang parler, écoute le sang parler, écoute le sang parler
Écoute le sang parler, écoute le sang parler, écoute le sang…

[Couplet 1 : Ekoué]
On nous a confisqué nos vies, paroles d’un père de famille instruit
Loin, très loin de ces comptes rendus accablants
Un regard noir suffit, jeté du coin de l’œil
Crevé d’orgueil et de mépris pour éveiller ces instants enfouis
Avec le prima du verbe sur leurs écrits, intoxiqués de références
Falsifiés jusqu’à la moelle des os, aussi inepte que sans honte
Me dit mon père, à relater des affres sans colmater ces balafres
Et cicatrices de guerre laissées par des années de torture
Entre les rouages d’une machine à broyer nos traditions et cultures
Parle-moi de ces milliers d’hommes sacrifiés au pays
Parle-moi de ceux qui, à l’heure où j’écris
Creusent de leurs mains des fosses communes, une par une
Pour accueillir leur destin
Parle-moi de ces réclamations ouvrières noyées dans le sang
Puis de ces consensus de bons sentiments humanitaires de ces blancs
Donneurs de tapes dans le dos, amateurs d’exotisme
L’exemple d’une vertu chrétienne suppôt du colonialisme
Dans ces longs silences d’après témoignages dignes d’une éloge funèbre
Mon père, avec cette lucidité d’un grand révolutionnaire
Me fait comprendre que la peur n’est qu’une mauvaise conseillère
Et le doute l’entreprise du bourreau
Pendant que l’Afrique compte ses morts, ses mythes et ses corbeaux
[Refrain]x2
Écoute le sang parler, écoute le sang parler, écoute le sang parler
Écoute le sang parler, écoute le sang parler, écoute le sang…

[Couplet 2 : ?]
On partait à l’école nu-pieds chercher le savoir
Chemise et short immaculés, impeccablement repassés
Jusque tard le soir, après des kilomètres de champs entourés de mystère
Des chemins jonchés de pierres, en pleine nuit noire, se souvient mon père
Aujourd’hui, ce ne sont que des restes, des dettes
Des chapes de pneus consumées sur la terre battue
Quelques douilles éparpillées sur le sol
Des vieux barils perdus et autres stigmates d’affrontements récents
Entre ces jeunes émeutiers qui rêvent de liberté
Et ces patrouilles discrètes qui perpétuent l’horreur de 34 années sanglantes d’une dictature de fer, dans ces rues devenues mornes comme des cimetières
Où sont ces hommes dont les récits nous interrogent sur ce que nous sommes ?
Avec cette nostalgie des poètes de la négritude
Ces chants qui ont bercés notre enfance, ces griots narrateurs des blessures de nos ancêtres portent-ils toujours nos inquiétudes ?
Loin des clichés indécents qui n’ont rien d’autre à dire
Que cette misère noire ne nous enlève pas le sourire !
Enfant du pays, le drame de toute une époque
Que tu traverses ne t’a pas épargné, n’est-ce pas ?
Le poison de la désinformation a eu raison des vérités de l’histoire
Qui t’accompagneront, au grand péril de ton exil, paraît-il
Vers une France si généreuse et porteuse de progrès
Où s’enracine le mépris dans chaque pas que tu fais
En quelques mots, si le fatalisme et l’isolement prédomine ici
La haine trouvera son écho
Et l’Afrique compte ses morts, ses mythes et ses corbeaux
[Refrain]x2
Écoute le sang parler, écoute le sang parler, écoute le sang parler
Écoute le sang parler, écoute le sang parler, écoute le sang…