Salut l’ami, quoi d’neuf depuis ces dix piges ?
J’veux dire à part le rap, les livres et les litiges ?
J’ai vu passer les morts quand notre jeunesse s’enterre
Pendant qu’tout autour de moi de plus en plus sont pères
J’espère mieux mais je crains toujours le pire
Manière simple de perdre et c’est peu de le dire
C’est p’t-être qu’on s'est loupé, noyé dans la houle
Et après huit ans d’étude, j’ai l’impression d’m’être fait rouler
Et quoi d’nouveau depuis l’époque des survêt’ Tacchini
Y’avait plus de fous qu’aujourd’hui de bars à Sashimi
Sale chimie que mélange des jours qui te rattrapent
Au fait, as-tu encore c’foutu best of de Kool G Rap ?
J’retiens le positif puisque le rare est précieux
Mais j’n’ai qu’une plume bon marché pour planter les cieux
J’rêvais d’autre chose mais le réel me colle à la peau
Tant d'nos jours, en soirée les ados tournent à la coke
J’ai beau faire l’dur, jouer la carte du détachement
Frère, je t’ai laissé il y a dix ans un peu lâchement
T’avais la tronche d’un type rempli de nostalgie
Probable qu’aujourd’hui tu grattes encore ta poésie
Au fait, la musique ne me nourrit toujours pas
Et j’insiste mais je perds patience à chaque nouveau pas
Disons qu’dans vingt ans, j’aurai p’t-être des idéaux
Et surtout l’air d’un con à 50 piges devant mes vidéos
J’ai grandi sans le savoir, quand mes espoirs tanguaient
J’avais des vers à écrire mais le temps m’étranglait
Comme Kafka je songe à des portes qui s’entrouvrent
Apparemment c’qu’on cherche n’est jamais ce qu’on trouve
Depuis vient le silence, mes mots flottent et puis s’embrasent
La mort n’aura pas d’empire selon Dylan Thomas
J’ai traversé une ruelle de plus vers le tombeau
Dans trois générations, ton nom sera plus qu’un écho
Souvent j’ai pensé à toi et comptais les décombres
Tu m’as raté au croisement, faut dire j’étais une ombre
Celui de tes semelles, de tes doutes et de tes peurs
Peut-être suis-je l’éternelle source de tes pleurs
J’ai tenté de lutter mais la bataille fut sommaire
Tu as construit ton nid dans la niche de mon plexus solaire
La route s’est refermé depuis qu’on a le choix
Ton goût pour la tristesse à balayer ma joie
Mâchoire serrée quand l’air rempli cette chambre étroite
J’ai toujours eu cette attitude discrète et droite
De ma banlieue Est à mes quasis trente berges
J’ai fait des rencontres mais j’ai toujours les mêmes frères
Et oui l’ami, rien d’neuf depuis ces dix piges
J'veux dire à part le rap, les livres et les litiges
Si j’avais osé, j’t’aurais écris ce texte plus tôt
Ils t’appellent tous Lucio mais pour moi tu restes Ludo
T’as beau faire l’dur, jouer la carte du détachement
Frère tu m’as laissé, il y a dix ans un peu lâchement
J’avais la tronche d’un type rempli de nostalgie
Bien sûr qu’aujourd’hui, je gratte encore ma poésie
Au fait, la musique ne me nourrit toujours pas
Et j’insiste mais je perds patience à chaque nouveau pas
Disons qu’dans vingt ans, j’aurai p’t-être des idéaux
Et surtout l’air d’un con à 50 piges devant mes vidéos