Léo Ferré
Vison l’éditeur
Je suis sur un coup fantastique
Il va falloir travailler dur
C'est pas que j’aime la musique
Mais là vraiment c'est un coup sûr

C'est au quartier de la bohème
Qu’on m'a signalé un auteur
« Allez dire à celle que j'aime
Que l'argent c'est pas le bonheur »

Prenez vos pinces de dièse
Vos chalumeaux de bémols
Ouvrons donc la parenthèse
Au chant de ce rossignol
Clef de sol à l'abordage
Clef de fa faisant le gué
Profitons de l'avantage
La portée n'est pas fermée

Dans sa cuisine une guitare
Tâchez de ne pas la manquer
Dans son placard quelques bécarres
Laissez-les-lui ils sont brisés

Pour moduler sur tous ses thèmes
Prenez les clefs de sa douleur
Car c’est sur la peine que j’aime
Voir pousser mon blé d'éditeur

Prenez ses rides de dièse
Et ses larmes de bémols
Tirons sur la parenthèse
Du chant de ce rossignol
Clef de sol tapie dans l’ombre
Clef de fa sur le palier
Et faisons des coupes sombres
Dans cette forêt d'idées

On m'a dit qu'il fallait fair’ vite
Qu'il ne mangeait pas à sa faim
Avant qu'il ne chante en bronchite
Tâchez qu'il chante pour mon bien

Achetez quelques chrysanthèmes
Ça montrera qu'on a du cœur
Ce n'est qu'à leur tombe que j'aime
Voir pousser mon blé d'éditeur
Imprimons cette fadaise
À des milliers de formats
Et fermons la parenthèse
À ce qui fut le contrat
Et sur les ondes cosmiques
Que s'en aillent incognito
Les paroles et la musique
Que m'a laissées cet idiot

FAITES-MOI DE LA MUSIQUE
ET FAITES-M'EN DES KILOS !