Léo Ferré
La Fontaine de sang
Il me semble parfois que mon sang coule à flots
Ainsi qu’une fontaine aux rythmiques sanglots
Je l’entends bien qui coule avec un long murmure
Mais je me tâte en vain pour trouver la blessure
À travers la cité, comme dans un champ clos
Il s’en va, transformant les pavés en îlots
Désaltérant la soif de chaque créature
Et partout colorant en rouge la nature
J’ai demandé souvent à des vins captieux
D’endormir pour un jour la terreur qui me mine ;
Le vin rend l’œil plus clair et l’oreille plus fine !
J’ai cherché dans l’amour un sommeil oublieux ;
Mais l’amour n’est pour moi qu’un matelas d’aiguilles
Fait pour donner à boire à ces cruelles filles !