Georges Brassens
Les Amours d’antan
Moi, mes amours d'antan c'était de la grisette
Margot, la blanche caille, et Fanchon, la cousette...
Pas la moindre noblesse, excusez-moi du peu
C'étaient, me direz-vous, des grâces roturières
Des nymphes de ruisseau, des Vénus de barrière...
Mon prince, on a les dam's du temps jadis - qu'on peut...
Car le coeur à vingt ans se pose où l'?il se pose
Le premier cotillon venu vous en impose
La plus humble bergère est un morceau de roi
Ça manquait de marquise, on connut la soubrette
Faute de fleur de lys on eut la pâquerette
Au printemps Cupidon fait flèche de tout bois...
On rencontrait la belle aux Puces, le dimanche :
"Je te plais, tu me plais..." et c'était dans la manche
Et les grands sentiments n'étaient pas de rigueur
"Je te plais, tu me plais. Viens donc beau militaire"
Dans un train de banlieue on partait pour Cythère
On n'était pas tenu même d'apporter son c?ur...
Mimi, de prime abord, payait guère de mine
Chez son fourreur sans doute on ignorait l'hermine
Son habit sortait point de l'atelier d'un dieu...
Mais quand, par-dessus le moulin de la Galette
Elle jetait pour vous sa parure simplette
C'est Psyché tout entier' qui vous sautait aux yeux
Au second rendez-vous y' avait parfois personne
Elle avait fait faux bond, la petite amazone
Mais l'on ne courait pas se pendre pour autant...
La marguerite commence avec Suzette
On finissait de l'effeuiller avec Lisette
Et l'amour y trouvait quand même son content
C'étaient, me direz-vous, des grâces roturières
Des nymphes de ruisseau, des Vénus de barrière
Mais c'étaient mes amours, excusez-moi du peu
Des Manon, des Mimi, des Suzon, des Musette
Margot la blanche caille, et Fanchon, la cousette
Mon prince, on a les dam's du temps jadis - qu'on peut...