Georges Moustaki
Ballade en fumée
Te voilà tombée en disgrâce
Tu peux toujours te parfumer
Te voilà presque mal aimée
Portant tu gardes ton panache
Même s'il n'est que de fumée
Je t'ai connue dans ma jeunesse
Tu as brûlé tous mes pianos
Quand je jouais plus ou moins faux
Dans les bordels du vieil Anvers
Et ça faisait pleurer Margot
Je m'adresse à ma cigarette
Ma jolie blonde au goût anglais
Ma brune amère à mon palais
Le mégot des jours de disette
Celle qu'autrefois je roulais
Tu m'as séduit comme jadis
Tu séduisais peuples et rois
L'ingratitude faisait loi
On t'a mise au rayon des vices
Des drogues de deuxième choix
Je rêve à mes chansons futures
En te tenant entre mes doigts
Je cherche la rime avec toi
Et tout au long de l'aventure
On se consume toi et moi
Tout à l'heure en sortant de scène
C'est toi que je respirerai
Comme je te respire après
Chaque émotion et chaque peine
Dans un geste presque sacré
Tu es parfois ma récompense
Et parfois ma consolation
Dans mes moments de réflexion
Tu viens calmer mon impatience
Et je remets tout en question
Tu sais me rendre fraternel
Quand tu passes de main en main
Jusqu'au moment où tu t'éteins
Après la dernière étincelle
Comme une étoile du matin
Certains vont battre la campagne
Te dénoncer comme un poison
Moi je t'accueille en ma maison
Et je fais de toi ma compagne
Même s'ils ont un peu raison