Georges Moustaki
La paresse
Je venais de me réveiller
Quand j'entendis mon oreiller
Me murmurer avec tristesse
Tu m'abandonnes chaque jour
Pour aller vers d'autres amours
D'autres plaisirs, d'autres ivresses
Reste avec moi encore un peu
On s'entend si bien tous les deux
Pourquoi partir quand rien ne presse?
Je t'enseignerai les vertus
De ce péché si répandu
Mais toujours trahi: la Paresse
Celui qui aime à ne rien faire
N'ira jamais faire la guerre
C'est fatigant et dangereux
Jamais il ne sera tenté
Par l'existence survoltée
D'un monde dur et laborieux
Il ne connaît ni dieu ni maître
Pour interdire ou lui permettre
De vivre sans collier ni laisse
Il sait surtout se garder libre
Dans l'harmonie et l'équilibre
De sa complice, la Paresse
J'écoutai cette voix amie
Et aussitôt me rendormis
Bercé par ces tendres paroles
Et je me retrouvai soudain
Au milieu d'un joli jardin
Fleuri des fleurs les plus frivoles
Un jardinier vint m'accueillir
Avec un lumineux sourire
Et le regard plein de sagesse
Il me dit "Tu es arrivé
Au pays dont tu as rêvé
Le royaume de la Paresse"
La Paresse