Éric Zemmour
L’Appel du 30 Novembre
Mes chers compatriotes,

Depuis des années, un même sentiment vous étreint, vous oppresse, vous hante. Un sentiment étrange et pénétrant de dépossession. Vous marchez dans les rues de vos villes et vous ne les reconnaissez pas. Vous regardez vos écrans et on vous parle une langue étrange et, pour tout dire, étrangère. Vous jetez un œil et une oreille aux affiches publicitaires, aux séries télévisées, aux matchs de football, aux films de cinéma, aux spectacles, aux chansons, et aux livres scolaires de vos enfants.
Vous prenez des métros et vous prenez des trains, vous vous rendez dans des gares et dans des aéroports, vous attendez votre fille ou votre fils à la sortie de l’école, vous accompagnez votre mère aux urgences de l’hôpital, vous faites la queue à la poste ou à l’agence pour l’emploi, vous patientez dans un commissariat ou dans un tribunal, et vous avez l’impression de ne plus être dans le pays que vous connaissez.
Vous vous souvenez du pays que vous avez connu dans votre enfance, vous vous souvenez du pays que vos parents vous ont décrit, vous vous souvenez du pays que vous retrouvez dans les films ou dans les livres : le pays de Jeanne d’Arc et de Louis XIV, le pays de Bonaparte et du Général De Gaulle, le pays des chevaliers et des gentes dames, le pays de Victor Hugo et de Châteaubriant, le pays de Pascal et de Descartes, le pays des fables de La Fontaine, des personnages de Molière et des vers de Racine, le pays de Notre-Dame de Paris et des clochers dans les villages, le pays de Gavroche et de Cosette, le pays des barricades et de Versailles, le pays de Pasteur et de Lavoisier, le pays de Voltaire et de Rousseau, de Clémenceau et des poilus de 14, de De Gaulle et de Jean Moulin, le pays de Gabin et de Delon, de Brigitte Bardot et de Belmondo, de Johnny et d’Aznavour, de Brassens et de Barbara, des films de Sautet et de Verneuil.
Ce pays à la fois léger et brillant, ce pays à la fois littéraire et scientifique, ce pays tellement intelligent et fantasque : le pays du Concorde et des centrales nucléaires, qui a inventé le cinéma et l’automobile. Ce pays que vous cherchez partout avec désespoir, dont vos enfants ont la nostalgie sans même l’avoir connu. Ce pays que vous chérissez et qui est en train de disparaître. Vous n’avez pas déménagé et pourtant vous avez la sensation de ne plus être chez vous. Vous n’avez pas quitté votre pays mais c’est comme si votre pays vous avait quitté. Vous vous sentez étrangers dans votre propre pays. Vous êtes des exilés de l’intérieur.
Longtemps, vous avez cru être le seul à voir, à entendre, à penser, à craindre. Vous avez eu peur de le dire, vous avez eu honte de vos impressions. Longtemps, vous n’avez pas osé dire ce que vous voyiez et surtout, vous n’avez pas osé voir ce que vous voyiez. Et puis vous l’avez dit à votre femme, à votre mari, à vos enfants, à votre père, à votre mère, à vos amis, à vos collègues, à vos voisins. Et puis, vous l’avez dit à des inconnus et vous avez compris que votre sentiment de dépossession était partagé par tous. La France n’était plus la France et tout le monde s’en était aperçu.

Bien sûr, on vous a méprisé : les puissants, les élites, les bien-pensants, les journalistes, les politiciens, les universitaires, les sociologues, les syndicalistes, les autorités religieuses vous disaient que tout cela était un leurre, que tout cela était faux, que tout cela était mal. Mais vous avez compris avec le temps que c’étaient eux qui était un leurre, que c’étaient eux qui avaient tout faux, que c’était eux qui vous faisaient du mal.
La disparition de notre civilisation n’est pas la seule question qui nous harcèle, même si elle les domine toutes : l’immigration n’est pas cause de tous nos problèmes, même si elle les aggrave tous. La tiers-mondisation de notre pays et de notre peuple l’appauvrit autant qu’elle le disloque, le ruine autant qu’elle le tourmente. C’est pourquoi vous avez souvent du mal à finir vos fins de mois, c’est pourquoi nous devons réindustrialiser la France, c’est pourquoi nous devons rééquilibrer notre balance commerciale, réduire notre dette qui grossit, ramener en France nos entreprises qui ont déménagé, redonner du travail à nos chômeurs.
C’est pourquoi nous devons protéger nos trésors technologiques et cesser de les brader aux étrangers. C’est pourquoi nous devons permettre à nos petites entreprises de vivre, et de grandir, et d’être transmises de génération en génération. C’est pourquoi nous devons préserver notre patrimoine architectural, culturel, et naturel. C’est pourquoi nous devons restaurer notre école républicaine, son excellence et son culte du mérite, et cesser de livrer nos enfants aux expériences égalitaristes des pédagogistes et des Docteur Folamour des théories du genre et de l’islamo-gauchisme. C’est pourquoi nous devons reconquérir notre souveraineté abandonnée aux technocrates et aux juges européens qui ont dépouillé le peuple français de sa capacité à décider de son sort au nom des chimères d’une Europe qui ne sera jamais une nation.
Oui, nous devons rendre le pouvoir au peuple, le reprendre aux minorités qui ne cessent de tyranniser la majorité, et aux juges qui substituent leur férule juridique au gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. Depuis des décennies, nos gouvernants de droite comme de gauche nous ont conduits sur ce chemin funeste du déclin et de la décadence. Droite, gauche : ils vous ont menti. Ils vous ont dissimulé la gravité de notre déclassement, ils vous ont caché la réalité de notre remplacement.

Vous me connaissez depuis des années. Vous savez ce que je dis, ce que je diagnostique, ce que j’annonce. Je me suis longtemps contenté du rôle de journaliste, d’écrivain, de Cassandre, de lanceur d’alerte. Je croyais alors qu’un politicien allait s’emparer du flambeau que je lui transmettais. Je me disais « A chacun son métier, à chacun son rôle, à chacun son combat ».
Je suis revenu de cette illusion. Comme vous, je n’ai plus confiance. Comme vous, j’ai décidé de prendre notre destin en main. J’ai compris qu’aucun politicien n’aurait le courage de sauver le pays du destin tragique qui l’attendait. J’ai compris que tous ces prétendus compétents étaient surtout des impuissants. Que le Président Macron, qui s’était présenté comme un homme neuf, était en vérité la synthèse de ses deux prédécesseurs, en pire. Que dans tous les partis, ils se contenteraient de réformer alors que le temps presse. Il n’est plus temps de réformer la France mais de la sauver.
C’est pourquoi j’ai décidé de me présenter à l’élection présidentielle. J’ai donc décidé de solliciter vos suffrages pour devenir votre Président de la République. Pour que nos enfants et nos petits-enfants ne connaissent pas la barbarie. Pour que nos filles ne soient pas voilées et que nos fils ne soient pas soumis. Pour que nous puissions leur transmettre la France telle que nous l’avons connue et reçue de nos ancêtres. Pour que nous puissions encore préserver nos modes de vie, nos traditions, notre langue, nos conversations, nos controverses sur l’Histoire ou la mode, notre goût pour la littérature et la gastronomie. Pour que les Français restent des Français fiers de leur passé et confiants dans leur avenir. Pour que les Français se sentent de nouveau chez eux et pour que les derniers arrivés s’assimilent à leur culture, s’approprient leur Histoire. Pour que nous refassions des Français en France, et pas des étrangers sur une terre inconnue.
Nous, les Français, nous sommes une grande Nation, un grand Peuple. Notre glorieux passé plaide pour notre avenir : nos soldats ont conquis l’Europe et le monde, nos grands écrivains et nos artistes ont suscité l’admiration universelle. Les découvertes de nos scientifiques et les fabrications de nos industriels ont marqué leur époque. Le charme de notre art de vivre fait l’envie et le bonheur de tous ceux qui y goûtent. Nous avons connu d’immenses victoires et nous avons surmonté de cruelles défaites. Depuis mille ans, nous sommes une des puissances qui ont écrit l’Histoire du monde. Nous serons dignes de nos ancêtres. Nous ne nous laisserons pas dominer, vassaliser, conquérir, coloniser. Nous ne nous laisserons pas remplacer.

Face à nous se dressera un monstre froid et déterminé qui cherchera à nous salir. Ils vous diront que vous êtes racistes, ils vous diront que vous êtes animés par des passions tristes alors que c’est la plus belle des passions qui vous anime : la passion de la France. Ils vous diront le pire sur moi, mais je tiendrai bon : les quolibets et les crachats ne m’impressionneront pas. Je ne baisserai jamais la tête car nous avons une mission à accomplir. Le peuple français était intimidé, tétanisé, endoctriné, culpabilisé. Mais il relève la tête, il fait tomber les masques, il dissipe les miasmes mensongers, il chasse ses mauvais bergers.
Nous allons continuer la France. Nous allons poursuivre la belle et noble aventure française, nous allons transmettre le flambeau aux prochaines générations.
Aidez-moi, rejoignez-moi, dressez-vous. Nous les Français, nous avons toujours triomphé de tout.

Vive la République, et surtout, vive la France.