Jean Ferrat
Je vous aime
Pour ce rien cet impondérable
Qui fait qu'on croit à l'incroyable
Au premier regard échangé
Pour cet instant de trouble étrange
Où l'on entend rire les anges

Avant même de se toucher
Pour cette robe que l'on frôle
Ce châle quittant vos épaules
En haut des marches d'escalier
Je vous aime
Je vous aime

Pour la lampe déjà éteinte
Et la première de vos plaintes
La porte à peine refermée
Pour vos dessous qui s'éparpillent
Comme des grappes de jonquilles

Aux quatre coins du lit semés
Pour vos yeux de vague mourante
Et ce désir qui s'impatiente
Aux pointes de vos seins levés
Je vous aime
Je vous aime
Pour vos toisons de ronces douces
Qui me retiennent me repoussent
Quand mes lèvres vont s'y noyer
Pour vos paroles démesure
La source le chant la blessure
De votre corps écartelé
Pour vos reins de houle profonde
Pour ce plaisir qui vous inonde
En long sanglots inachevés
Je vous aime
Je vous aime