Gabriel Fauré
J’ai presque peur, en vérité
J'ai presque peur, en vérité
Tant je sens ma vie enlacée
A la radieuse pensée
Qui m'a pris l'âme l'autre été
Tant votre image, à jamais chère
Habite en ce coeur tout à vous
Ce coeur uniquement jaloux
De vous aimer et de vous plaire ;
Et je tremble, pardonnez-moi
D'aussi franchement vous le dire
À penser qu'un mot, qu'un sourire
De vous est désormais ma loi
Et qu'il vous suffirait d'un geste
D'une parole ou d'un clin d'oeil
Pour mettre tout mon être en deuil
De son illusion céleste
Mais plutôt je ne veux vous voir
L'avenir dût-il m'être sombre
Et fécond en peines sans nombre
Qu'à travers un immense espoir
Plongé dans ce bonheur suprême
De me dire encore et toujours
En dépit des mornes retours
Que je vous aime, que je t'aime !