Amir
Cet homme
Sur un bout de trottoir
Avec des yeux trop noirs
Pour n’avoir pas pleuré
Son âme est une fenêtre
C’est une plaie ouverte
Qu’on ne peut qu’effleurer
C’est juste un être à part
Que les gens ne voient pas
Comme un mot raturé
Les mains comme des pierres
Asséchées par l’hiver
Qui ne fait que durer

Je suis passé cent fois devant
J’aurais pu m’arrêter
Lui donner un sourire, un instant
J’étais trop pressé

J’aurais pu être cet homme
Qui n’a plus rien ni personne
Combien de coups faut-il
Combien de coups faut-il
Avant que la vie nous assomme

Il a tout perdu cet homme
Mais personne ne s’en étonne
Combien de temps faut-il
Combien de temps faut-il
Avant qu’une âme abandonne
S’abandonne, abandonne
Sur un bout de trottoir
Juste au bord du trou noir
Le cœur déjà penché
Je l’ai revu l’autre soir
Sous un ciel illusoire
Le bitume pour plancher
Cet arbre sans racine
Dont les branches dessinent
Un parcours déformé
La ville est son dortoir
Il a besoin pitié que d’humanité

Il est toujours digne pourtant
J’aurais pu m’arrêter
L’écouter même modestement
J’ai même pas essayé
J’aurais pu être cet homme
Qui n’a plus rien ni personne
Combien de coups faut-il
Combien de coups faut-il
Avant que la vie nous assomme

Il a tout perdu cet homme
Mais personne ne s’en étonne
Combien de temps faut-il
Combien de temps faut-il
Avant qu’une âme abandonne
S’abandonne, abandonne
Je l’ai appris d’un passant
Que je croise parfois
Au hasard d’un café
On ne le reverra pas
Demain c’est le printemps
L’hiver l’a emporté

J’aurais pu être cet homme
Qui n’a plus rien ni personne
Combien de coups faut-il
Combien de coups faut-il
Avant que la vie nous assomme
Il a tout perdu cet homme
Mais personne ne s’en étonne
Combien de temps faut-il
Combien de temps faut-il
Avant qu’une âme abandonne
S’abandonne, abandonne