Leonard Cohen
L’homme de l’an passé
[Paroles de "L'homme de l'an passé"]
La pluie tombe sur l'homme de l'an passé
Il y a une guimbarde sur la table, un crayon dans sa main
Et les coins de sa feuille ont roulé vers ses doigts
Les pointes des punaises jettent des ombres sur le bois
Et le ciel est comme une peau pour un tambour que je ne veux plus réparer
Et toute la pluie tombe sur l'œuvre de l'homme de l'an passé
J'ai rencontré une femme jouant avec ses soldats dans le noir
Il fallait qu'elle dise qu'elle s'appelait Jeanne d'Arc
Je suis resté un moment dans cette grande armée
Je te remercie, Jeanne, de m'avoir si bien traité
Bien que je porte l'uniforme, je n'étais pas né pour cette vie
À tes côtés, tous ces hommes blessés, bonne nuit, amie, bonne nuit
J'ai assisté à un mariage que de vieilles familles avaient préparé
Bethléem était l'époux, Babylone la mariée
Grande Babylone elle était nue, tremblant pour ma vie
Bethléem nous enflammait comme un timide à une orgie
Notre chair était comme une voile quand nous sommes tombés tous les deux
Il fallait l'écarter pour voir le serpent mordre sa queue
Il y a des femmes qui attendent Jésus comme d'autres attendent Caïn
Je reste pendu à mon autel, une hache dans ma main
Et j'emmène celui qui me trouve là où tout a commencé
Quand Jésus était la lune de miel et Caïn l'homme tombé
Et nous lisons dans des bibles reliées de peaux et de sang
Que le désert assemble une dernière fois tous, tous ses enfants
La pluie tombe sur l'homme de l'an passé
Une heure s'est écoulée, sa main n'a pas bougé
Mais toute chose arrivera s'il donne le mot, ô mes frères
Les amants s'aimeront, les montagnes toucheront la terre
Mais le ciel est comme une peau pour un tambour que je ne veux plus réparer
Et toute la pluie tombe sur l'œuvre de l'homme de l'an passé